CAA Nantes n° 17NT01520 M. A du 15 mars 2019 (indemnisation fonctions supérieures au grade)

N° 17NT01520
3ème chambre
M. COIFFET, président
M. Eric BERTHON, rapporteur
M. GAUTHIER, rapporteur public
CABINET CALLON AVOCAT ET CONSEIL, avocat
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier de la Côte Fleurie à lui verser la somme de 21 832,52 euros à titre de rappel de traitement correspondant à la rémunération qu'il aurait dû percevoir en tant que préparateur en pharmacie hospitalière entre juin 2008 et octobre 2014, d'annuler la décision du 26 janvier 2016 de son employeur lui refusant le versement de cette somme ainsi que le rejet implicite du recours gracieux qu'il a formé contre cette décision.
Par un jugement n° 1601418 du 23 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 mai 2017 M. B..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 23 mars 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 26 janvier 2016 du directeur du centre hospitalier de la Côte Fleurie lui refusant le versement d'une indemnité de 21 832,52 euros à titre de rappel de traitement ainsi que le rejet implicite du recours gracieux qu'il a formé contre cette décision ;
3°) de condamner le centre hospitalier de la Côte Fleurie à lui verser 21 832,52 euros à titre de " dommages et intérêts ", cette somme devant porter intérêt au taux légal à compter de la date de sa demande indemnitaire ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de la Côte Fleurie la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a exercé les fonctions de préparateur en pharmacie hospitalière entre juin 2008 et octobre 2014 alors même qu'il ne possédait que le grade d'agent d'entretien ;
- le centre hospitalier de la Côte Fleurie a commis une faute engageant sa responsabilité en le nommant sur un emploi correspondant à un grade supérieur ;
- il a droit à une indemnité de 21 832,52 euros correspondant à la différence entre le traitement qu'il a perçu et celui qui aurait dû lui être versé en sa qualité de préparateur en pharmacie hospitalière ;
- à titre subsidiaire, une indemnité d'un montant identique devra lui être versée en réparation de son préjudice de carrière et de son préjudice moral.
Une mise en demeure a été adressée le 6 juin 2018 au centre hospitalier de la Côte Fleurie.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Berthon,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., titulaire du grade d'agent d'entretien qualifié depuis le 1er juillet 2003, a été affecté à partir du 1er septembre 2006 au service de la pharmacie du centre hospitalier de la Côte Fleurie. Il a obtenu, le 30 juin 2008, le diplôme de préparateur en pharmacie et, le 5 septembre 2013, celui de préparateur en pharmacie hospitalière. Il a été reçu au concours sur titre de préparateur en pharmacie hospitalière le 9 octobre 2014. Il a été nommé préparateur en pharmacie hospitalière de classe normale stagiaire à compter du 10 octobre 2014 et titularisé dans ce grade le 10 octobre 2015. Estimant qu'il avait, entre juin 2008 et octobre 2014, exercé les fonctions de préparateur en pharmacie tout en étant rémunéré comme agent d'entretien, il a présenté à son employeur une demande indemnitaire tendant à ce que lui soit versé le montant correspondant à la différence de traitement entre les deux grades, soit 21 832,52 euros. Le directeur du centre hospitalier de la Côte Fleurie a rejeté sa demande par une décision du 26 janvier 2016. M. B...a formé un recours gracieux contre cette décision auquel son employeur n'a pas répondu. Il a alors saisi le tribunal administratif de Caen de demandes tendant à la condamnation du centre hospitalier de la Côte Fleurie à lui verser la somme en litige et à l'annulation des décisions par lesquelles le centre hospitalier de la Côte Fleurie a rejeté sa demande indemnitaire préalable. Par un jugement du 23 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. M. B...relève appel de ce jugement.
2. En premier lieu, M. B...produit pour la première fois en appel les témoignages détaillés de deux collègues pharmaciennes et ses évaluations pour les années 2009 à 2014, dont il résulte sans ambiguïté qu'il a été employé à partir de juin 2008 sur des fonctions de préparateur en pharmacie hospitalière, comme il le soutient. Toutefois, en application des dispositions de la loi du 13 juillet 1983 selon lesquelles le grade est distinct de l'emploi, il est loisible à un employeur public d'affecter un agent sur un emploi normalement occupé par un agent de grade supérieur. En outre, une telle affectation ne confère aucun droit à percevoir le traitement correspondant à ce grade. Par suite, M. B...n'est pas fondé à demander la condamnation du centre hospitalier de la Côte Fleurie à lui verser un rappel de traitement correspondant au surplus de rémunération qu'il aurait perçu en tant que préparateur en pharmacie hospitalière entre juin 2008 et octobre 2014, grade que durant cette période il ne possédait pas, ni à demander l'annulation des décisions contestées de son employeur refusant de lui verser cette indemnité.
3. En deuxième lieu, si M. B...soutient, sans d'ailleurs l'expliquer, que son affectation entre juin 2008 et octobre 2014 sur un emploi de préparateur en pharmacie hospitalière lui a causé un préjudice de carrière, il ne l'établit pas. Aucune indemnité ne peut donc lui être accordée à ce titre.
4. Enfin, il résulte de l'instruction que l'affectation de M. B...sur un emploi de préparateur en pharmacie hospitalière, souhaitée par l'intéressé, a contribué, par l'expérience qu'elle lui a conférée, à son succès à l'examen puis au concours de préparateur en pharmacie hospitalière et n'est donc pas étrangère à la progression de sa carrière. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir que cette affectation lui aurait causé un préjudice moral.
5. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes et, d'autre part, que ses conclusions, présentées pour la première fois en appel, tendant à ce qu'une indemnité d'un montant 21 832,52 euros lui soit versée en réparation de son préjudice de carrière et de son préjudice moral ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier de la Côte Fleurie, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à M. B... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au centre hospitalier de la Côte Fleurie.
Délibéré après l'audience du 28 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président-assesseur
- M. Berthon, premier conseiller,
- Mme Le Bris, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mars 2019.
Le rapporteur
E. Berthon
Le président
O. Coiffet
Le greffier
M. C...
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Dans une affaire, un agent d’entretien qualifié hospitalier travaille depuis le 1er septembre 2006 à la pharmacie de l’hôpital. Détenteur du diplôme de préparateur en 2008 puis en pharmacie hospitalière en 2013, l’hôpital le nomme stagiaire le 10 octobre 2014 et le titularise un an plus tard.
Estimant qu’il a, depuis la détention de son diplôme en 2008, exercé des fonctions de préparateur en pharmacie tout en étant rémunéré comme agent d’entretien, il réclame un différentiel de 21 000 € entre les 2 grades, une demande que rejette son employeur comme le tribunal.
En appel, il produit les témoignages détaillés de 2 collègues pharmaciennes et ses évaluations successives qui toutes attestent sans ambiguïté qu’il exerçait, dès 2008, des fonctions de préparateur en pharmacie hospitalière.
Mais, pour la cour, la loi de 1983, en distinguant le grade et l’emploi, permet à l’employeur d’affecter un agent sur un poste normalement occupé par un fonctionnaire de grade supérieur. Et cette affectation ne lui confère aucun droit à percevoir le traitement correspondant.
À retenir : c’est donc logiquement que l’intéressé s’est vu refuser toute indemnisation et il ne saurait obtenir l’indemnisation d’un préjudice de carrière. Au contraire, la cour relève que son affectation a contribué, par l’expérience qu’elle lui a conférée, à son succès à l’examen puis au concours de préparateur en pharmacie, ce qui exclut également tout préjudice moral.
CAA Nantes n° 17NT01520 M. A du 15 mars 2019.
Pierre-Yves Blanchard le 17 mars 2020 - n°1666 de La Lettre de l'Employeur Territorial
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